Troisième exposition de Nicolas Canu à la Point Rouge Gallery, mais première exposition de Point Rouge Gallery  à  Saint Remy de Provence.
 

Pourrions-nous dire que le travail de Nicolas Canu a changé ? Il a certainement mûri et il s’est apaisé. Nicolas Canu semble moins revendiquer, moins chercher à prouver quelque chose. Moins de violence — la couleur aussi y est assagie, assouplie — et plus de profondeur.
Les grands formats que nous découvrons dans cette exposition donnent au geste du peintre une puissance toute particulière. Certes, ils sont grands, imposants ; mais, par leurs sujets et par les détails qu’ils nous demandent d’aller chercher, ils restent pourtant attachés à une approche intime. Nous sommes loin ici d’œuvres qui seraient créées pour le musée et non pour une délectation privée, voire secrète. Car, dans ces peintures récentes, les sujets qu’aborde Nicolas Canu sont des scènes quotidiennes, familiales : l’enfant est souvent présent, le père et son enfant, le chien de la famille, les amis. L’atmosphère de clair-obscur (le peintre a d’ailleurs appelé son exposition : « Journées d’ombres et de lumières ») contribue à nous amener à ce moment incertain, entre chien et loup, pendant lequel les certitudes s’évanouissent et l’identification du spectateur à l’œuvre se fait plus aisément. Cet enfant n’est-il pas le mien ? Ou même, n’étais-je pas cet enfant ? L’homme qui se repose sur un près, c’était moi, n’est-ce pas (« Apaisé ») ? Ce bateau, je me souviens que je le poussais, jadis, sur ce ruisseau (« Au fil de l’eau »). Cette fête de village, n’était-ce pas l’été dernier dans ce village que j’aime (« Un peu fatigué ») ? En fait, cette plage (« La grève du Nord » ou « Comme un cerf-volant »), ce banc (« La corneille »), ce voyage en train (« Le temps change vite » et « Le départ »), ce piquenique (« Dimanche entre amis » ou « Décontracté »), toutes ces scènes, je les connais si bien ! Mais je ne les connais pas pour les avoir seulement vues : je suis certain de les avoir au moins partiellement vécues.
Là est un des talents de Nicolas Canu dans ces descriptions minutieuses d’un quotidien qui, à n’en pas douter, lui appartient. Sa force, c’est qu’il arrive à nous faire ressentir que ce quotidien nous appartient aussi à chacun, en propre ; il réussit à nous faire revivre, plus intensément peut-être, des éclats de vie arrachés à notre histoire personnelle. Est-ce sa vie qu’il transpose sur la toile ou bien est-ce la nôtre ? C’est en tout cas une expérience picturale et émotionnelle passionnante à laquelle Nicolas Canu et la Point Rouge Gallery nous invitent.
 

Étienne Yver, 2018
 

Nicolas CANU
du 31 mars au 06 mai 2018
« Journées d’ombres et de lumières »
Vernissage samedi 31 mars à 17h